dimanche 21 septembre 2008

Histoire d’école

Nostalgie éducative.


On a beaucoup parlé ces temps-ci dans les médias, de l’école et de la décadence de l’enseignement, du manque de motivations des élèves et des professeurs etc. Le bon vieux discours « le niveau baisse » fleurit. Et le petit Mario de l’Assemblée Nationale qui s’y met avec l’éloge des High School et voilà la nostalgie qui s’en mêle, avec l’habituel refrain du « c’était mieux autrefois ».
Les profs, entre autres, seraient moins compétents, paraît-il. Pas motivé, pas capable de contrôler leurs classes, etc.

Comme j’ai fêté mon demi-siècle cette année, je me suis dit qu’un peu de perspective historique ne nuirait pas au débat. Je vais piger dans mes souvenirs personnels.

Voici trois petites anecdotes, elles se sont passées à Plessisville, dans les années 60.

La première m’a été contée par mon frère, plus âgé que moi de 7 ans. Alors qu’il étudiait la soudure à l’école « d’arts et métiers », un religieux, enseignant au Collège des Pères Ste-Croix (dans l’édifice duquel se trouve aujourd’hui la polyvalente La Samarre), venait donner les cours de matières générales aux étudiants des « arts et métiers ».
Sa première phrase en entrant en classe était de s’exclamer, s’adressant aux étudiants :
« Comme vous n’êtes pas épanouis, comparés à mes étudiants du cours classique ! ».
Parfois, après cet exercice de motivation, il leur racontait son ambition de devenir un saint.

Le père était sûr qu’il était destiné à la sainteté depuis qu’il avait été attaqué par le Diable et avait dû lutter avec l’Esprit Malin jusqu’à ce qu’il entende la voix du seigneur qui criait « Lâche-le ! » et, le Diable l’avait lâché.
Non, ce n’est pas Fred Pellerin qui racontait cela à un public rigolard mais un enseignant à ces étudiants adolescents, avec tout le sérieux possible.

La deuxième, j’en ai été témoins alors que j’étais en 3e année du primaire, à l’école Chanoine-Boulet, toujours à Plessisville. En 1966.
L’enseignante était une religieuse. Un des élèves de la classe n’avait pas fait ses devoirs.
La religieuse l’engueule et, finalement, lui dit de retourner chez lui faire ses devoirs et de revenir avec un billet signé de ses parents. C’est là qu’il lui fait une réponse, à vrai dire peu diplomatique : « C’est de mes affaires, ça, christ ! ». La religieuse attrape le bambin de 8-9 ans par les cheveux et, avec une énergie qu’on ne lui soupçonnait pas, lui écrase le visage sur le mur de ciment de la classe. La trace de sang sur le mur faisait bien 7-8 pouces de long. Puis elle le pousse dehors, le sang dégoulinant de son nez sur son chandail. Après quoi on reprend la classe sans autres commentaire.
.Est-ce qu’il y a eu des suites ? Jamais entendu parler.

La troisième, je l’ai vécu en 6e année à l’école St-Édouard, toujours à Plessisville. En 1969. Cette fois, l’enseignante était une laïque. Une grande blonde en mini-jupe. C’était durant le cours de « catéchèse ». On en était à une partie où nous lisions des textes sur ce qui se faisait dans d’autres pays par des gens d’autres religions (Pour ceux qui pensent que cet aspect sera nouveau dans le fameux cours « d’Éthique et culture religieuse »…) .
On en arrive à un passage sur l’athéisme officiel soviétique. Et là, l’enseignante d’y aller d’une petite tirade.
« C’est sûr que nous n’aimons pas le régime soviétique mais ça ne veut pas dire qu’il ne s’y fait que de mauvaises choses. Après tout, les Russes ont eu de grands leaders. Qu’on pense à Hitler qui, malgré ses défauts, a fait de grandes choses pour le peuple russe… »
Voici Hitler devenu leader soviétique !
J’avais 11 ans et je savais que c’était une connerie gigantesque. Mais ai-je levé la main pour rectifier ? Non. Je me la suis fermé prudemment. Pourquoi ? Parce que je savais aussi, pour en avoir été témoins, que contredire cette enseignante, c’était s’attirer des taloches.
Alors plusieurs dans la classe sont sortis convaincus qu’Hitler était russe et, dans le fond, un bon gars. J’ai essayé de leur apprendre que ce n’était pas tout à fait ça mais à quoi bon ? « Hitler est russe, la maîtresse l’a dit. Penses-tu en savoir qu’elle ? Pourquoi c’est pas toi qui enseigne, d’abord ? ». Il n’y a rien à faire devant une pareille démonstration de compétence.

Alors la nostalgie ? Non merci, j’essaie d’arrêter…

P.S. : « Histoires à Dormir Debout » est également une émission de radio que vous pouvez entendre sur les ondes de CJRD 88,9 les jeudis soir à 23h, animée par Claire Tessier avec moi comme chroniqueur. Si vous êtes en dehors de Drummondville, vous pouvez écouter en ligne sur le www.cjrd.fm

Et, cette semaine, mardi le 23 septembre, je participerai à l’émission « Mêlons nous de nos affaires », animée par Alain Cossette, toujours à CJRD mardi soir à 18h. Attention : on va parler des élections fédérales ! Plus précisément : la religion dans la campagne et l’éventualité d’une coalition NPD-Bloc québécois.

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